« J’aurais pu vous accueillir chez moi. Mais la honte, trop de bordel, trop de trucs par terre, de vaisselle qui traîne, il aurait fallu que je fasse deux heures de ménage », dit-elle après une heure d’entretien, dans la chambre d’un hôtel de la place des Vosges, à Paris, où a finalement été fixé le rendez-vous. Avant, Karole Rocher s’est appliquée à répondre aux questions sans trop déborder, corrigeant elle-même ses égarements, notamment sur les blessures de l’enfance. « Enfin ça, on s’en fout, c’est pas le propos. Fin de l’histoire. »
Difficile de tenir à distance sa propre nature. La sienne est directe et instinctive. Sa confiance accordée, elle digresse, lâche ce qu’elle a sur le cœur, comme ça vient. Elle emmerde les cons, n’a pas de temps à perdre avec les gens qui « se la racontent », qui mentent, trahissent ou blessent. Ceux-là, elle les balaie d’un revers de main, mais elle sait bien, au fond, qu’ils la rendent triste. Le monde du cinéma ? Elle ne s’y sent pas forcément à l’aise. « Je n’ai pas les codes ni les outils. C’est comme si on me demandait d’aller travailler au siège d’une banque à la Défense. Je me dirais : “Mais comment je vais faire, avec ces gens ?” »
Pourtant, au cinéma, elle y a toute sa place, une légitimité qu’elle a acquise, à sa manière, sans concessions (« Je n’ai jamais joué pour un réalisateur dont je sentais qu’il pourrait me faire du mal »), au fil de rencontres affectives auxquelles elle demeure fidèle. Il en va ainsi avec la réalisatrice Sylvie Verheyde. Elle a joué dans tous ses films : Un frère (1997), Princesses (2000), Stella (2008), Confessions d’un enfant du siècle (2011), Sex Doll (2016) et le dernier, Madame Claude, disponible sur Netflix. Karole Rocher, 46 ans, y tient le rôle-titre avec une majesté troublante, fruit d’un long cheminement.
L’intuition comme un radar
« J’ai découvert Madame Claude dans un documentaire d’“Un jour, un destin” [Serge Khalfon, 2011]. J’ai été impressionnée par sa personnalité, intriguée par cette femme un peu âgée, dure et très seule. J’en ai parlé à Sylvie Verheyde, qui, je l’ai alors appris, pensait elle aussi à ce sujet depuis des années. Avec Thomas Ngijol [humoriste, acteur, réalisateur et compagnon depuis dix ans de l’actrice], nous avons financé le développement d’une première version coécrite par Sylvie et mon frère, Patrick Rocher. »
Pour préparer le rôle, Karole Rocher lit et voit tout ce qui a trait à Madame Claude. Puis s’arrête net. « Sans vouloir paraître prétentieuse, j’ai senti que je l’avais captée, se souvient-elle. Mais alors, j’avais deux solutions. Soit je tentais de l’imiter dans ces airs de grande bourgeoise qu’elle s’inventait, soit je l’abordais en tant que Fernande Grudet, une fille sortie de rien qui devient un gangster au féminin. Une pauvresse qui prend sa revanche sociale mais passe à côté de l’amour, d’elle-même et de sa propre fille. Voilà qui m’intéressait, ce dont je me sentais proche. Sylvie avait la même approche. Nous avons choisi de livrer notre interprétation de Madame Claude. »
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