Dans le film, Céline Dion change de prénom. C'est la plus grosse fantaisie de cette comédie de Valérie Lemercier.
Quand Valérie Lemercier a commencé à écrire le scénario de sa fiction librement inspirée de la vie de Céline Dion, elle nommait son idole en utilisant son nom et son prénom. Normal, quoi. Mais quelque chose n'allait pas. La réalisatrice se sentait bloquée. En prenant des libertés avec l'identité de la star internationale, «on [avec Brigitte Buc, la coscénariste] s'est autorisées à composer avec le réel, inventer des détails», explique-t-elle dans le dossier de presse. Cette solution a permis à la fan de se sentir plus à l'aise avec son sujet. «Il me fallait construire cette histoire avec le maximum de précision, mais avec un pas de côté, à quelques mètres, respectueux d'elle…», précise-t-elle.
Les mêmes raisons ont motivé son refus de tourner dans la maison des parents de la chanteuse, à Charlemagne (Québec). «Je préférais ne pas fouler sa propre vie.» Pour le reste, le scénario d'Aline est très proche de la biographie de Céline Dion.
La petite dernière
Céline Dion est la petite dernière d'une grande famille de quatorze enfants. Dans le long-métrage, le personnage naît des années après ses cinq frères et huit sœurs. Sa mère nouera rapidement une relation fusionnelle avec cette enfant inattendue, au point de la faire dormir dans le tiroir d'un meuble de sa chambre. C'est tout à fait exact, à un détail près: dans la vraie vie, les enfants Dion ne s'appellent pas Jean-Claudin, Jean-Damien ou encore Jean-Sylvain, mais Michel, Paul, ou encore Daniel. Un peu moins marrant. Quant à Céline, elle doit son prénom à la chanson «Céline» de Hughes Aufray, un tube sorti deux ans avant sa naissance, en 1968 (et non à la chanson «Aline» de Christophe, sortie alors que Céline avait déjà 11 ans).
Le film reste fidèle aux faits: chaque enfant joue d'un instrument. Bercée par la musique, la petite Céline se met vite à chanter. À l'âge de 5 ans, elle se produit pour la première fois devant un public à l'occasion du mariage de son frère Michel. Elle prend ensuite l'habitude d'accompagner ses frères et sœurs au chant dans le restaurant de ses parents, Le Vieux Baril. À l'école, elle est souvent absente et cumule les mauvaises notes.
Sa famille voit déjà en elle la grande interprète qu'elle deviendra à l'avenir. Céline n'a pas encore 12 ans lorsque sa mère Thérèse et son frère Jacques lui composent une chanson originale, «Ce n'était qu'un rêve», pour l'envoyer à un impresario. Michel, un autre de ses frères, envoie l'enregistrement à René Angélil, dont il a découvert le nom sur le dos d'une pochette d'album de Ginette Reno, dont la renommée va au-delà des frontières du Québec. Sans la détermination de la famille de celle qui deviendra l'une des plus grandes chanteuses à voix de sa génération, l'homme qui sera à l'origine de sa carrière n'aurait peut-être jamais écouté cette cassette.
Comme le met en scène Valérie Lemercier, c'est un coup de téléphone qui convainc l'agent artistique d'écouter la chanson de l'adolescente. Il est alors sans travail après avoir été remercié par Ginette Reno. «Si vous aviez écouté cette démo, vous m'auriez déjà appelé», aurait dit Michel Dion à l'impresario. L'appel portera ses fruits. René Angélil abandonne ses plans de reconversion dans le droit et mise tout sur la jeune fille.
Aline reste fidèle à la réalité en filmant la première audition de la future star –à un détail près: les chaussures. Cette scène émouvante où Aline/Céline, qui a oublié de se chausser, emprunte les souliers de sa mère, est une invention. Valérie Lemercier avait envie de faire une allusion aux milliers de paires de chaussures qui s'accumuleront plus tard dans le dressing de son idole.
D'enfant prodigue à star internationale
Au Québec, elle connaît un succès presque immédiat avec sa chanson «Ce n'était qu'un rêve». René hypothèque sa maison pour produire son premier disque, La Voix du Bon Dieu, qui cartonnera au Québec. Un an après, en 1982, le single «Ce n'était qu'un rêve» sort en France. En août 1982, Céline Dion apparaît pour la première fois à la télévision française, dans l'émission destinée à la jeunesse «Croque-vacances». Quelques mois plus tard, elle est l'invitée de «Champs Élysées», le programme présenté par Michel Drucker. Elle y interprète «D'amour ou d'amitié» et devient la première Canadienne à obtenir un disque d'or en France. En 1986, déterminée à devenir une star internationale, elle fait une pause. La jeune femme fait refaire sa dentition, change de look et prend des cours d'anglais intensifs chez Berlitz.
Quand elle revient sur le devant de la scène, en 1988, elle n'est plus une enfant. Désormais vingtenaire et pleine de confiance en elle, elle remporte l'Eurovision, où elle représente la Suisse, avec la chanson «Ne partez pas sans moi». C'est son premier succès hors de la francophonie.
Dans la foulée, elle signe un contrat chez Epic Records aux États-Unis et sort un album en anglais, Unison, en 1990. Grâce à des chansons plus modernes que celles qu'elle interprétait jusqu'alors, elle se fait une place de choix en tant qu'artiste pop sur les marchés anglophones. Sa popularité ne fait que grandir avec les années. Sortis en 1996 et 1997, ses albums Falling Into You et Let's Talk About Love figurent parmi les plus vendus de l'histoire de l'industrie musicale.
Elle n'abandonne pas pour autant le français. D'eux (1995), fruit de sa collaboration avec Jean-Jacques Goldman, est l'album francophone le plus vendu en France et dans le monde. La décennie suivante sera dictée par sa vie personnelle. Pour réussir à enfanter et à élever sa famille, elle se pose à Las Vegas. Le soir, de 2003 à 2007, elle se produit au Caesars Palace, le spectacle en résidence le plus rentable de l'histoire. Après sa tournée à succès «Taking Chances World Tour», de 2008 à 2009, elle reprend sa résidence à Las Vegas de 2011 à 2019 et donne plusieurs tournées régionales dans le monde.
Son René
Rien de tout ça n'aurait été possible sans «son René». Valérie Lemercier ne s'y est pas trompée. Elle a mis leur histoire d'amour au cœur d'Aline. «J'aime les couples pas assortis, les amours empêchées qui finissent par l'emporter», explique-t-elle. Quand Céline et René se rencontrent, la jeune fille n'a que 13 ans. Lui, 38. Il est marié, père de famille et s'intéresse surtout à la voix hors du commun de sa graine de star. Elle est touchée par la douceur de son aîné et par l'attention qu'il lui porte.
En 1985, René Angélil divorce. La chanteuse a 17 ans et rêve d'une relation amoureuse. Sa mère le comprend et fait tout pour éloigner le quadragénaire de sa fille. Lui-même la repousse. Trop jeune. Pendant un an, il l'évite. Quand il vient la voir au concours de l'Eurovision, elle en profite pour arriver à ses fins. Pendant cinq ans, la chanteuse et son manager vivent leur histoire d'amour en secret. En 1991, il lui demande sa main. Dans le film, la bague de fiançailles cachée dans une glace est une invention de Valérie Lemercier. En 1993, Céline Dion révèle enfin sa relation amoureuse, en direct à la télévision canadienne. Celle qui est désormais une chanteuse adulée dans le monde entier épouse l'homme de sa vie quelques mois plus tard, dans une robe presque aussi énorme que celle que l'on voit dans Aline.
Après une fécondation in vitro des plus pénibles, la chanteuse tombe enceinte. Elle l'annonce à René dans la cuisine, lors d'un repas. Valérie Lemercier explique le choix qu'elle a fait pour raconter cette soirée: «J'ai trouvé mignon qu'Aline trace les lettres “BB” dans la purée, car ce genre de fantaisie ressemble à Céline.» Des années plus tard, elle donnera naissance à ses jumeaux, Nelson et Eddy. Le 14 janvier 2016, René décède à la suite d'un cancer. Ce qui se passe alors dans la vie de la star internationale, personne ne le sait hormis ses proches. Valérie Lemercier l'imagine faire une fugue dans les rues de Las Vegas. On aime bien.
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