Gadget ou outil pour les entreprises?
La dernière création d’Apple, le Vision Pro, entre en scène. Ce casque de réalité mixte, présenté comme un «ordinateur spatial», promet de révolutionner nos interactions numériques.
Après des années de développement en coulisses, Apple a enfin dévoilé sa dernière innovation: le Vision Pro. Salué comme une révolution technologique par certains, beaucoup s’interrogent pourtant encore sur les capacités et les applications concrètes de ce casque de réalité mixte – la superposition du réel et du virtuel. Mais pour Tim Cook, pas de doute, il s’agit bel et bien d’un nouveau produit révolutionnaire pour la marque à la pomme: «Tout comme le Mac nous a fait découvrir l’informatique personnelle, et l’iPhone l’informatique mobile, Apple Vision Pro nous fait découvrir l’informatique spatiale» affirme le CEO d’Apple.
Le Vision Pro se positionne comme le premier «ordinateur spatial», marquant une étape significative dans l’évolution des interfaces utilisateur. Contrairement à ses prédécesseurs de chez Google et Meta, qui ont également exploré la réalité mixte sans parvenir à une adoption significative en dehors du secteur entertainment et vidéo ludique, Apple semble avoir trouvé la formule pour répondre aux attentes et populariser cette technologie. Si Apple n’a pas inventé la réalité mixte, fidèle à sa réputation, l’entreprise a redéfini le concept en le rendant plus élégant, plus intuitif et surtout, plus utile.
Le Vision Pro permet de reproduire fidèlement la réalité de votre environnement, tout en y superposant des écrans virtuels de votre choix. Il devient donc possible de projeter un écran de cinéma 4K – avec une réelle impression de profondeur – sur le plafond blanc de votre salon en un instant, ou une recette vidéo au beau milieu de votre cuisine.
Vision Pro: un gadget de plus?
Pour autant, bien que les performances du Vision Pro surpassent celles de ses concurrents, il est légitime de s’interroger sur l’utilité de ce casque, en particulier du point de vue des entreprises. Est-ce un énième gadget superflu, ou bien, au contraire, un potentiel outil de travail à considérer?
Comme souvent, lorsque l’on parle de technologie, la vérité se situe souvent dans un juste milieu, et seul l’avenir nous éclairera à ce sujet. Néanmoins, du point de vue de l’entreprise, on peut relever le potentiel certain du Vision Pro, qui devrait permettre de catalyser l’innovation dans des domaines d’application déjà établis comme la formation, le design industriel, et les stratégies de marketing produit. De plus, l’entrée d’un géant de l’industrie comme Apple va incontestablement stimuler l’innovation des fabricants historiques de casques comme Meta ou Pico, les incitant à élever leurs standards.
Mais, plus intéressant encore, le casque Vision Pro pourrait bien marquer un véritable pivot vers un nouveau segment de marché: la réalité mixte, autrefois cantonnée à des applications ludiques ou de niche, s’apprête à devenir un outil quotidien, notamment dans le monde professionnel. Apple propose ainsi une vision du futur du travail, où la frontière entre le physique et le virtuel s’estompe, offrant de nouvelles possibilités d’interaction et de collaboration à distance. Si le casque permet de projeter des films, n’oublions pas qu’il permet aussi d’envoyer des mails, d’aller sur Excel, Word ou Slack en un pincement de doigt.
L’aspect le plus intéressant du Vision Pro réside peut-être dans sa capacité à s’intégrer de manière transparente à l’écosystème d’Apple. La synergie entre le casque et d’autres produits comme le MacBook ouvre de nouvelles dimensions interactives et ergonomiques pour les outils de travail. Cette intégration promet de transformer radicalement notre manière de travailler, rendant les interactions plus immersives et intuitives. Or, cela n’aura échappé à personne, le monde du travail tend bien justement vers les caractéristiques proposées par le Vision Pro.
Future of work: redéfinir le travail
On le constate depuis plusieurs années déjà: l’innovation technologique s’accélère, à tel point que les entreprises adaptent leur organisation à cette cadence nouvelle. Désormais, confrontée à une cascade interrompue de nouvelles compétences à absorber, l’entreprise doit se penser comme un assembleur de compétences au-delà des moyens traditionnels comme le salariat. En conséquence, elles sont de plus en plus nombreuses à faire appel à des freelances, bureaux d’études et cabinets de conseils… Une statistique pour attester de cette évolution: si seulement 10% de la population mondiale travaillait en tant que freelance en 1970, aujourd’hui, ils représentent 40% de la population active mondiale, et ce sera près de 70% à horizon 2030. Cette tendance reflète et confirme une manière nouvelle pour les talents issus de la génération Z de voir le monde et d’évaluer leur rapport au travail, à laquelle il appartient aux entreprises de s’adapter.
Il s’agit d’une transformation fondamentale, qui vient totalement rebattre les cartes du mode de fonctionnement des entreprises, mais aussi de leur manière de travailler. Elles doivent désormais composer avec des équipes multiculturelles, réparties aux 4 coins du globe dans des bureaux et des pays différents. Alors, pour maintenir le lien et la productivité entre collègues, l’immersion apparaît comme un moyen de rester connecté à distance. Le Vision Pro, avec son ergonomie et ses performances hors normes, permet tout justement de confondre partiellement cette fracture entre réel et virtuel, en s’abolissant de la distance et créant une nouvelle forme de lien social dans l’entreprise.
En conclusion, s’il est encore trop tôt pour faire un constat définitif, on peut toutefois d’ores et déjà s’accorder sur le fort potentiel du Vision Pro dans le cadre de l’entreprise. Une excursion vers le futur du travail et l’évolution des modes de collaboration, qui pourrait à terme ouvrir la voie à un nouveau segment de marché, voir nous permettre de repenser l’entreprise, son fonctionnement et son rôle. Toutefois, son prix élevé et les préoccupations concernant le confort lors d’une utilisation prolongée freinent pour l’instant son adoption. Assistons-nous à l’émergence de «l’environnement de travail ultime» promis par Apple? Seul le temps nous le dira. On serait pourtant bien tenté de faire le parallèle avec la sortie du Macintosh en 1984, qui a précédé la révolution de l’ordinateur personnel.
Olivier Brourhant, fondateur, Chairman & CEO Mantu.
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